Rituel hivernal : remiser les chaises de parterre,
ramasser les feuilles mortes de mon parterre et celles
du voisin que le vent transporte allègrement, rentrer du
bois de chauffage pour le foyer, mettre en ordre le
fonctionnement du chasse-neige, enlever les
moustiquaires, et surtout, ajuster les coupe-froid des
portes.
Que l’hiver soit ! Je l’attends maintenant de pied ferme
bien au chaud et je me moque de ses fantaisies.
D’autres pourtant n’ont pas eu à se préoccuper de ces
préparatifs : ils se sont demandé plutôt s’ils
trouveraient un gîte pour passer certaines nuits, s’ils
pourraient se nourrir demain, s’ils auraient assez
d’huile à chauffage dans le réservoir, bref, comment ils
réussiraient une fois de plus à traverser la froidure.
En ajustant mes fameux coupe-froid, je devenais
songeur : empêcher le froid de pénétrer dans ma maison
fait aussi obstacle à toute chaleur qui voudrait s’en
échapper.
S’il fallait qu’il en soit ainsi de mon cœur : empêcher
le froid de l’autre de le pénétrer et bloquer toute
chaleur qui pourrait s’en échapper dans des gestes
d’amour et de partage …
Vagabonds, itinérants, sans abri, clochard, inadaptés
sociaux, que m’importe le nom que notre savante société
vous donne ! Je sais seulement que vous aurez froid
pendant que mes coupe-froid me garderont bien au chaud.
JE SENS MON INCONFORTABLE CHALEUR |